18 Juil 2011, 00:34
Interview au soir de cette nouvelle démonstration de force de l’équipe :
Question : « Avec plus de 3 minutes d’avance sur Kreuziger et Andy Schleck, Peter Velits et Tony Martin ont quasiment gagné le tour, non ? Ils devraient même finir tous les deux sur le podium… »
Réponse : « Je vais vous donner la réponse langue de bois habituelle : tant que la ligne d’arrivée n’est pas franchie, on ne peut pas crier victoire. C’est un cliché, mais c’est vrai. Un coureur n’est jamais à l’abri d’un accident, d’un jour sans, donc on ne peut tirer de conclusions maintenant. Tout ce qu’on peut dire, c’est qu’on est dans une position idéale, qu’on va donner tout ce qu’on peut pour la victoire sur ce tour 2012, mais rien n’est fait, il reste plusieurs étapes de montagne exigeantes. Quant à Tony sur le podium, on aimerait vraiment, mais ça sera très compliqué, il perd malheureusement pas mal de temps dans les cols, on vise plutôt un top 10 avec lui. »
Q : « Peter Velits et Tony Martin s’illustrent, par contre, c’est plus dur pour Cavendish cette année. Vous privilégiez le général et négligez un peu votre sprinteur ? »
R : « Allez dire à Martin Velits et Patrick Gretsch qui abattent un travail considérable depuis le début du tour pour revenir sur les échappées qu’on néglige les sprints… Non, bien sûr, on ne néglige pas Mark Cavendish, qui reste le leader chez HTC, mais on a cette année, avec le parcours de ce tour, une occasion unique de faire un podium, voire de l’emporter, donc on la saisit. Mark a tout de même remporté deux étapes, ce n’est pas rien, beaucoup d’équipes aimeraient en dire autant. Mais c’est vrai qu’on est tellement habitué à le voir gagner que lorsqu’il gagne juste un peu moins, on pense qu’il a un problème. Le tour n’est pas fini, il reste plusieurs étapes de plaine, on fera les comptes sur les Champs… »
Q : « Comme chaque année, HTC brille sur l’épreuve cycliste la plus prestigieuse et médiatique au monde. N’est-ce pas paradoxal que vous ayez tant de mal à trouver un sponsor pour la saison prochaine et que l’avenir de votre équipe soit si incertain ? »
R : « Ca, il faut en parler avec Bob Stapleton, je suis tout autant surpris que vous de cette situation. On a beau, depuis la création de HTC, être l’équipe qui comptabilise le plus de victoires chaque année, ça ne nous assure même pas de pouvoir continuer. Il faut dire qu’avec la suspicion qui règne sur le vélo à cause de toutes ces affaires de dopage, beaucoup d’entreprises se montrent frileuses et craignent de se voir éclaboussées par un scandale si elles associent leur nom à une équipe cycliste. Pourtant, nous n’avons jamais eu le moindre coureur impliqué dans une affaire, mais les tricheries de quelques-uns nuisent à tout le milieu. »
Q : « La situation est d’autant plus critique pour vous qu’on annonce beaucoup de vos meilleurs coureurs dans d’autres formations l’an prochain. Surtout votre star, Mark Cavendish, qui a signé chez Sky selon toute vraisemblance. »
R : « Rien n’est encore fait, on regretterait vraiment de se séparer du meilleur sprinter de la planète, qui nous a apporté tant de grandes victoires sur le tour, mais on ne peut pas lui reprocher d’aller voir ailleurs, tant qu’on ne peut lui donner de vraies garanties pour l’an prochain. »
Q : « C’est même l’hécatombe chez HTC, Sivtsov est lui annoncé aussi chez Sky, Tejay Van Garderen aurait signé 3 ans chez BMC, Goss et Renshaw sont fortement pressentis dans la nouvelle équipe australienne, GreenEdge, on parle de Tony Martin chez Astana ou Saxo Bank, de Peter Velits chez Quick-Step, il ne vous restera plus grand monde, on comprend aussi que les sponsors ne veulent pas s’investir avec vous si vous perdez vos meilleurs coureurs l’an prochain ! »
R : « Plusieurs choses. La première, je le répète, c’est que rien n’est fait, les contrats se signent au premier août, Bob Stapleton a encore quelques jours pour annoncer ce que sera le futur de l’équipe. La 2°, c’est que Martin a démenti avoir eu des contacts avec Saxo Bank ou Astana, et il nous a affirmé qu’il attendrait de voir ce qu’on lui propose, il aime l’équipe, et voudrait rester si on lui donne la possibilité. La 3°, c’est qu’on est effectivement dans un cercle vicieux. Plus on a du mal à trouver un sponsor sérieux et intéressant, plus nos coureurs sont tentés d’aller négocier ailleurs pour assurer leur avenir, et on les comprend. Du coup, on a encore plus de mal à trouver un sponsor. Mais même si ce que vous dites s’avère vrai, si l’on devait perdre plusieurs de nos meilleurs coureurs, on en embaucherait d’autres… »
Q : « Tout le monde se presse autour de Gilbert, dont le contrat se termine cette année. Est-ce que vous êtes sur les rangs, est-ce que vous comptez lui faire une proposition ? »
R : « Avoir un coureur tel que Gilbert dans l’équipe serait bien sûr fantastique, mais ça me semble compliqué, on ne peut toujours rien lui proposer maintenant alors que d’autres lui ont déjà fait des propositions très alléchantes. On aimerait beaucoup en faire notre grand leader pour les classiques, mais on sait que ce sera très dur. Et si ça se trouve, il a déjà fait son choix… »
Q : « Et vous, que feriez-vous l’an prochain si HTC s’arrête ? Vous avez des contacts avec d’autres équipes ? »
R : « Non. Franchement, ce n’est absolument pas ma priorité pour l’instant, quand vous avez deux coureurs aux deux premières places du Tour de France, et un 3° en lice pour le maillot vert, vous n’avez absolument pas le temps de démarcher auprès des uns et des autres, et vous avez bien d’autres choses à penser. On verra tout ça à la fin du tour. Et puis j’aime cette équipe, pour laquelle je travaille depuis plusieurs années, je resterais avec elle tant que ce sera possible. »
Q : « Des rumeurs ont parlé d’une fusion avec United Healthcare. Vous pourriez nous en dire plus ? »
R : « Désolé, je n’ai aucun scoop à vous offrir, je n’en sais guère plus que vous. C’est une hypothèse, mais il n’y a encore rien de concret. »
Q : « On affirme aussi qu’une entreprise allemande pourrait reprendre votre équipe, qu’en pensez-vous ? »
R : « Là encore, rien n’est officiel, rien n’est fait. Ce n’est qu’une autre hypothèse. Quant à savoir ce que j’en pense… je vais vous le dire honnêtement, que l’équipe soit allemande, américaine, croate ou congolaise, je m’en fiche pas mal, tout ce qui compte, c’est qu’elle continue d’exister ! »