Journal intime de Seweryn Szymaszek
29 avril 2013
Le plan d’action
Le soir de ma course en compagnie de Jozef Golec, et suite à sa crise de douleur, mon ami Sebastian, ma sœur Weronika, l’amour de ma vie Edyta et moi tenions un conseil de guerre dans notre appartement à Varsovie. Que faire ? Qui alerter ? Nos voisines, exitées par ce scénario de film d’espionnage, proposaient mille solutions impossibles. Prévenir les collègues de l’équipe ? peut-être certains en savent plus qu’ils n’en ont l’air. Faire l’indic à la police ? ils ont d’autres chats à fouetter. Prévenir la fédération polonaise de cyclisme ou le ministère des sports ? pourquoi pas, mais si la puissante firme Zubrowka est dans la combine chimique de Bruyneel et influence les dirigeants et hauts fonctionnaires de ces instances, nous sommes grillés. Envoyer des lettres de menace anonymes au manager belge ? cela risque de virer à la chasse au corbeau chez les bisons. Lancer une révolution au sein de l’équipe ? Organiser un kidnapping de Jozef ? Engager des tueurs de la mafia russe pour éliminer Bruyneel ? Les hypothèses devenaient peu à peu indécentes, mes amis s’en amusaient, je ne trouvais pas la situation aussi propice au rire et jettais un froid : « Bon sang, vous ne voyez pas qu’il y a un jeune qui souffre le martyr, vous ne voyez pas que je suis déjà à moitié viré de l’équipe, et ça vous fait rire !? ». Je m’excusais aussitôt les yeux embrumés, mes amis me laissèrent quelques secondes de répit, Sebastian proposa un plan d’action qui reçut l’aval des membres de l’alliance.
Le lendemain, pendant notre pause matinale sur les routes froides de Pologne, je demandai innocemment au vieux Vlad s’il avait déjà été confronté au dopage pendant sa carrière d’entraîneur. « Oui bien sûr, le goth. Surtout dans le milieu amateur, d’ailleurs. Mais c’était LeRat qui gérait ces problèmes, moi mon boulot consistait à transformer les jeunes coureurs en pros, point barre ! Si tu veux mon avis, les équipes qui systématisaient le dopage embauchaient des médecins du sport reconnus et spécialisés, le médecin des bisons, lui, était vétérinaire... alors bon… Pourquoi tu me poses toutes ces questions, petit ? ». Je saisîs la perche et avouai à mon coach l’origine de mes interrogations, le colis ouvert, les produits, Jozef, sa douleur… Je ne supportais plus d’être le témoin passif de ce drame et souhaitais tout déballer à un journaliste, mais qui ? « Je ne sais pas. Tu sais, je ne me déplaçais jamais avec l’équipe à l’étranger, à vrai dire, je ne suis jamais sorti des frontières, à part mon merveilleux voyage de noce en Roumanie sur la Mer Noire… Peut-être Ryzsard… ».
L’après-midi, nous rencontrâmes l’ancien médecin vétérinaire des bisons, en compagnie de son chien Pirato et de sa petite amie Karolina, sous le regard suspicieux de son père. Pendant que la fille de Vlad sortait la grosse boule de poil baptisée en hommage à Pantani, Ryszard fouilla dans sa mémoire : « Mmh… en France, il y a ce journaleux sportif à son compte, il s’appelle Pierre je crois. Il a eu des problèmes avec le milieu cycliste, avec son ancien employeur, avec à peu près tout le monde dans le peloton, mais peut-être que ton affaire pourrait l’intéresser… Je l’ai rencontré une fois, il y a une bonne dizaine d’années, il m’avait l’air d’un sacré petit fouineur, parfait pour le job ! ». Je remerciais mes vieux amis en leur demandant de rester discret et, de retour à l’appartement, googlisait le nom du journaliste en quête de coordonnées. Après deux heures de recherche infructueuse, je prîs la décision de contacter son éditeur.
Je sortis dans la rue et utilisai tous les trucs de détective pour reconnaitre une filature : arrêt sur un banc, attente et observation, tourner en rond sur un pâté de maison et entrer dans une boutique après un angle pour voir qui passe dans la rue (la boulangère ne dut pas comprendre lorsque je scrutai la rue et pas ses merveilleuses patisseries), changer de moyen de transport soudainement, etc. Rassuré, je me rendis dans un cybercafé de l’autre côté de la capitale, créai une messagerie anonyme et envoyai un mail en anglais à l’éditeur (Edyta m’a gentiment épaulé pour le rédiger). Il fallait m’armer de patience à présent.
L’un de mes héros, detective Conan
29 avril 2013
Le plan d’action
Le soir de ma course en compagnie de Jozef Golec, et suite à sa crise de douleur, mon ami Sebastian, ma sœur Weronika, l’amour de ma vie Edyta et moi tenions un conseil de guerre dans notre appartement à Varsovie. Que faire ? Qui alerter ? Nos voisines, exitées par ce scénario de film d’espionnage, proposaient mille solutions impossibles. Prévenir les collègues de l’équipe ? peut-être certains en savent plus qu’ils n’en ont l’air. Faire l’indic à la police ? ils ont d’autres chats à fouetter. Prévenir la fédération polonaise de cyclisme ou le ministère des sports ? pourquoi pas, mais si la puissante firme Zubrowka est dans la combine chimique de Bruyneel et influence les dirigeants et hauts fonctionnaires de ces instances, nous sommes grillés. Envoyer des lettres de menace anonymes au manager belge ? cela risque de virer à la chasse au corbeau chez les bisons. Lancer une révolution au sein de l’équipe ? Organiser un kidnapping de Jozef ? Engager des tueurs de la mafia russe pour éliminer Bruyneel ? Les hypothèses devenaient peu à peu indécentes, mes amis s’en amusaient, je ne trouvais pas la situation aussi propice au rire et jettais un froid : « Bon sang, vous ne voyez pas qu’il y a un jeune qui souffre le martyr, vous ne voyez pas que je suis déjà à moitié viré de l’équipe, et ça vous fait rire !? ». Je m’excusais aussitôt les yeux embrumés, mes amis me laissèrent quelques secondes de répit, Sebastian proposa un plan d’action qui reçut l’aval des membres de l’alliance.
- 1. Informer Vlad de la situation ; ancien membre du staff, viré par Bruyneel, il nous aidera à trouver un journaliste indépendant, si possible de nationalité étrangère.
2. Se rendre dans un lieu public pour rencontrer le journaliste.
3. Avoir des garanties d’anonymat.
4. Mettre en prison Bruyneel et sa clique, sauver Jozef.
Le lendemain, pendant notre pause matinale sur les routes froides de Pologne, je demandai innocemment au vieux Vlad s’il avait déjà été confronté au dopage pendant sa carrière d’entraîneur. « Oui bien sûr, le goth. Surtout dans le milieu amateur, d’ailleurs. Mais c’était LeRat qui gérait ces problèmes, moi mon boulot consistait à transformer les jeunes coureurs en pros, point barre ! Si tu veux mon avis, les équipes qui systématisaient le dopage embauchaient des médecins du sport reconnus et spécialisés, le médecin des bisons, lui, était vétérinaire... alors bon… Pourquoi tu me poses toutes ces questions, petit ? ». Je saisîs la perche et avouai à mon coach l’origine de mes interrogations, le colis ouvert, les produits, Jozef, sa douleur… Je ne supportais plus d’être le témoin passif de ce drame et souhaitais tout déballer à un journaliste, mais qui ? « Je ne sais pas. Tu sais, je ne me déplaçais jamais avec l’équipe à l’étranger, à vrai dire, je ne suis jamais sorti des frontières, à part mon merveilleux voyage de noce en Roumanie sur la Mer Noire… Peut-être Ryzsard… ».
L’après-midi, nous rencontrâmes l’ancien médecin vétérinaire des bisons, en compagnie de son chien Pirato et de sa petite amie Karolina, sous le regard suspicieux de son père. Pendant que la fille de Vlad sortait la grosse boule de poil baptisée en hommage à Pantani, Ryszard fouilla dans sa mémoire : « Mmh… en France, il y a ce journaleux sportif à son compte, il s’appelle Pierre je crois. Il a eu des problèmes avec le milieu cycliste, avec son ancien employeur, avec à peu près tout le monde dans le peloton, mais peut-être que ton affaire pourrait l’intéresser… Je l’ai rencontré une fois, il y a une bonne dizaine d’années, il m’avait l’air d’un sacré petit fouineur, parfait pour le job ! ». Je remerciais mes vieux amis en leur demandant de rester discret et, de retour à l’appartement, googlisait le nom du journaliste en quête de coordonnées. Après deux heures de recherche infructueuse, je prîs la décision de contacter son éditeur.
Je sortis dans la rue et utilisai tous les trucs de détective pour reconnaitre une filature : arrêt sur un banc, attente et observation, tourner en rond sur un pâté de maison et entrer dans une boutique après un angle pour voir qui passe dans la rue (la boulangère ne dut pas comprendre lorsque je scrutai la rue et pas ses merveilleuses patisseries), changer de moyen de transport soudainement, etc. Rassuré, je me rendis dans un cybercafé de l’autre côté de la capitale, créai une messagerie anonyme et envoyai un mail en anglais à l’éditeur (Edyta m’a gentiment épaulé pour le rédiger). Il fallait m’armer de patience à présent.
L’un de mes héros, detective Conan
Dernière édition par LeRat le 27 Juin 2014, 15:39, édité 1 fois au total.