Un article assez intéressant

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Affaire Astana/Affaire US Postal : des faits similaires ?
18 juillet 2000. C'est la fin d'une filature pour des journalistes de France 3. Dans les basques de l'US Postal, pour tourner un long sujet sur l'avènement de l'Américain sur le Tour de France, ils ont vu un soir, deux membres du staff de l'US Postal, sortir de l'hôtel ou logeait l'équipe, embarquant des sacs plastiques avec eux et se dirigeant avec, dans une voiture banalisé et immatriculé en Allemagne. C'est sur un container non loin de Morzine, ville d'arrivée d'une 15ème étape qui venait de se courir, que les deux hommes jettent les sacs. Les journalistes ont filmés et attendent qu'ils partent pour se tourner vers les sacs en question.
Une découverte surprenanteIls vont y trouver un contenu pour le moins intéressant. De tous les déchets médicaux retrouvés, ce qui marquera le plus seront les 160 seringues vides et les emballages tout autant vides d'Actovegin, qui n'est autre qu'un produit fait de sang de veau déproteiné. Un médicament qui améliore la circulation du sang au niveau du cerveau, mais qui par une certaine méthode, peut également oxygéner d'autres muscles. Avec des effets similaires à l’EPO, il serait encore plus efficace selon le professeur, Jean-Pierre de Mondenard, et surtout, « évite les effets secondaires comme la coagulation ». Surtout utilisé en Asie, ce produit est néanmoins commercialisé en Norvège, lieu de sa fabrication, tandis qu’il est interdit en France. Ces images filmés, l'équipe de France 3 ne pourront jamais les diffuser, l'équipe étant trop incompétente pour jugé des produits retrouvés selon la raison officielle, et très certainement également, la peur du retour de bâton du coté des hautes sphères de la chaîne. Cette histoire aurait d'ailleurs pu ne jamais sortir, mais peu de temps après, une lettre anonyme atterrit sur le bureau du procureur de Paris, Jean-Pierre Dintilhac. Et peu de temps après, le parquet de Paris diligente une enquête préliminaire à la brigade des stupéfiants. On est alors le 18 Octobre, soit exactement 3 mois après les faits.
Et le 22 Novembre, il y a assez d’éléments pour l’ouverture d’une information judiciaire contre X, l’affaire prend de l’ampleur, d’autant qu’entre temps, le Canard Enchaîné a révélé la liste des produits retrouvés. Des lors on retrace une histoire à court terme du produit incriminé. L’Actovegin, qui n’était pas considéré comme un produit dopant par le CIO, a été utilisé massivement lors des Jeux Olympiques de Sydney avec l’aval des autorités local. Suite à la prise de conscience médiatique, il ne faudra pas attendre plus d’un mois après l’ouverture de l’information judiciaire, pour que le CIO interdise le produit.
Des lors, tout le monde du vélo va aller de sa réaction, Jean Marie Leblanc affirmant même naïvement « pourquoi l'équipe américaine n'a-t-elle pas utilisé les conteneurs pour déchets mis en place par la Société du Tour de France? », du coté de l’équipe visé, on arrive aux démentis habituelles. « Active-O-Whatever ?! » disait Lance Armstrong sur son site internet, pendant que Johan Bruynell retourne la situation en mettant en cause les médias français. Judiciairement, L’US Postal est attaquable car le produit est interdit en France, sauf que l’équipe via son avocat affirmera plus tard qu’elle avait reçu l’aval de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFSSAPS), qui est l’autorité compétente pour pouvoir importer un produit, et qu’elle utilisait l’Actovegin pour soigner les plaies dues aux chutes ainsi que le diabète d’un membre du staff, avant de conclure en disant qu’aucun coureur de l’équipe participant au Tour n’en a utilisé…
Une sortie indemneL’US Postal s’en est sorti. Pour cause, les flacons de l’ensemble des produits étaient vides, aucun produit dopant n’a pu ainsi être identifié. Par ailleurs, les échantillons d’urines et de sang récupérés sur les divers contrôles effectués lors du Tour de France 2000, et analysés par l’UCI ne montrent rien d’anormal et aucune loi n’empêche d’avoir recours à du matériel de transfusion. Lorsque la partie adverse demande la réanalyse de ces échantillons par un professeur indépendant au sein du laboratoire Toxlab, les avocats de l’US Postal ne vont pas avoir de mal à entériner la demande, faute d’accusation spécifique contre l’équipe et à contrario de preuves, et vont obtenir un non lieu, un an et demi plus tard.
Des faits qui en rappellent d'autresAujourd’hui, on pourrait comparer cette affaire celle qu’est en train de secouer Astana. Des faits similaires, et à la fin peut être, un jugement similaire. Tout comme 8 ans auparavant, le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire et devrait normalement ouvrir une information judiciaire. Selon le rapport des enquêteurs de l'Oclaesp (NDLR : Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique), du matériel de perfusion ont été saisis dans les poubelles et chambres d’hôtel, ainsi que divers antihypertenseurs, qui sont utilisés entre autre, pour traiter l'hypertension artérielle que peut engendrer une transfusion sanguine ou une prise d'EPO. Ils ont pu faire analyser ces seringues par Toxlab, le même laboratoire qui n'a pu avoir l'occasion d'analyser certains échantillons, quelques années auparavant. Ils ont pu ainsi dresser sept profils génétiques de personnes différentes. Et cette fois ci, une loi est la pour appuyer la démarche judiciaire des enquêteurs, la loi du 3 Juillet 2008 touchant la lutte contre le trafic de produit dopant, et dont l’usage de matériel de perfusion est tout bonnement interdit. Maintenant la balle est dans le camp du parquet de Paris, et de l’UCI, qui si elle ne transmet pas les données sanguines des différents coureurs d’Astana, pourrait étouffer l’affaire dans l’œuf, et alimenter encore un peu plus les rumeurs d’une corrélation entre la Fédération et Lance Armstrong.
Source: Cyclism'Actu